AIPTLF 2025 - du 8 au 11 juillet 2025
Qualité de Vie :
Du Travail aux Autres Sphères de l'Existence
Session : Transformation Digitale au Travail
Transformation numérique des services judiciaires : Quelles incidences sur l’activité des agents ? Le cas de la digitalisation de la chaîne pénale
MORVAN N. 1, BOBILLIER-CHAUMON M. 1, GAUDART C. 1
1 Le Cnam, Paris, France
Cadre théorique
Cette communication s’appuie sur les données d’une recherche articulant psychologie du travail et ergonomie. Le contexte est une administration publique, dans laquelle le dialogue social est tendu sur les questions liées à la « transformation numérique » - terme de l’institution - fortement accélérée ces dernières années. Nous prospectons les incidences des transformations digitales sur l’activité des agents en juridiction, en faisant le lien entre santé et travail ; notamment dans la capacité « à réaliser » et « à SE réaliser » dans un travail de qualité. Nous cherchons de plus à agir sur les enjeux de santé et de sens du travail de ces mutations technologiques, en s’inscrivant dans l’approche de la clinique des usages (Bobillier Chaumon, 2023). Celle-ci vise à faire de la technologie un instrument d’expression, de transformation et de reconnaissance de l’activité, par une analyse située des conditions d’exercice du travail médiatisé. Les incidences potentielles sur l’activité, le sujet et sa santé sont approchées par l’analyse de l’acceptation située (Bobillier Chaumon, 2016).
Méthodologie
Une immersion est réalisée en juridiction, afin de mener 12 entretiens semi-directifs et des observations directes et ouvertes (type papier-crayon), en recueillant les verbalisations. Les données sont traitées par la méthode de l’étude de cas (Leplat, 2000) dans une approche qualitative et inductive. La manière dont les dispositifs numériques soutiennent ces activités est traitée en situation.
Principaux résultats
Les premiers résultats indiquent que les solutions numériques répondent prioritairement à des préoccupations stratégiques, visant l’accélération des décisions judiciaires. Cependant le numérique apparait aussi comme un « irritant » pour nombre d’utilisateurs, avec des dysfonctionnements récurrents qui empêchent, suspendent, déplacent l’activité (Clot, 1995), au risque d’incidences sur la santé, dans un contexte professionnel fortement contraint. Ces obstacles sociotechniques questionnent les possibilités d’agir des sujets, tant à travers l’organisation du travail déployée que par les instruments informatiques proposés (ou imposés). Cependant, ces obstacles nous apparaissent aussi comme des « trappes d’accès » au réel de l’activité (Clot, 1997), permettant d’engager ou de soutenir des réflexions et des controverses professionnelles sur le travail. Dans la perspective transformatrice de la clinique des usages, l’ambition est de comprendre et corriger le travail d’avant (celui qui se fait) pour mieux penser et se projeter dans le travail d’après (celui qui pourrait mieux se faire), avec ou sans les instruments technologiques.
Discussion
Les incidences de la digitalisation sur l’activité collective (Caroly, 2010) et son développement (Caroly & Barcellini, 2013) seront plus spécifiquement étudiés dans cette communication. A partir du cas de la digitalisation de la procédure pénale, portée successivement et parallèlement par différents acteurs le long de la chaîne pénale (procureur, juge d’instruction, président de tribunal, juge d’application des peines, ainsi que les greffiers de ces différentes magistrats) nous interrogerons les enjeux et les implications que font peser ces technologies sur la décision judiciaire : dans quelle mesure ces dispositifs soutiennent-ils sa qualité, du point de vue des professionnels, et à quelles conditions sont-ils des ressources pour le sujet et les collectifs de travail de pairs et inter-métiers ?
References: