AIPTLF 2025 - du 8 au 11 juillet 2025
Qualité de Vie :
Du Travail aux Autres Sphères de l'Existence
Session : Session posters 3 - 10 juillet de 10h30 à 11h00
« Ça fait partie du travail » : Facteurs organisationnels contribuant à la violence au travail vécues par les éducatrices en milieux scolaires
BARRIAULT S. 1, PELLETIER M. 1, LAHRIZI I. 1
1 Université Laval, Québec, Canada
La violence au travail constitue une violation des droits humains, compromet l'égalité des chances, est inacceptable et incompatible avec le travail décent (OIT, 2019). Le secteur de l'éducation est l'un des plus durement touchés par la violence au travail, en particulier la violence physique (Lippel, 2016). Dans la province de Québec, au Canada, 23 % des accidents du travail liés à la violence physique se sont produits dans ce secteur en 2023, une proportion en hausse de 7 points de pourcentage depuis 2019 (CNESST, 2025). Une récente étude menée auprès de 21 830 personnes travaillant dans une école primaire ou secondaire au Québec révèle que 32 % d'entre elles avaient vécu de la violence physique au cours de la dernière année. Les éducatrices en services de garde scolaire se démarquent : 47 % avaient vécu de la violence, dont 15 % souvent ou très souvent dans l'année de l'enquête (Pelletier et al., 2025). Cette violence peut avoir des impacts négatifs sur la santé psychologique et physique du personnel scolaire, en plus de nuire à la qualité de l'éducation (Montgomery, 2019). Bien que les causes de la violence au travail soient multifactorielles, quelques études montrent que des facteurs organisationnels sont associés à la violence des élèves envers le personnel, mais leur nombre est limité et portent sur le personnel enseignant (Andersen et al., 2021 ; Winding et al., 2022).Objectif : Cette communication vise à décrire comment certaines conditions organisationnelles dans lesquelles les éducatrices en services de garde scolaire exercent leur travail, contribuent ou non à la survenue et à la répétition de situations de violence de la part des élèves. Méthodologie: Il s'agit d'une étude qualitative narrative réalisée auprès d'un échantillon de 33 éducatrices en services de garde scolaire d'écoles primaires au Québec ayant vécu au moins une situation de violence physique de la part d'élèves. Elles ont été rencontrées en entretiens individuels au cours de l'hiver et du printemps 2024. Le cadre théorique de cette étude provient du domaine de la santé au travail et du management, soit le modèle Job Demand-Resources (Bakker et Demerouti, 2017). Celui-ci aborde les risques psychosociaux du travail en termes d'exigences (demandes) et de ressources, qui ont des effets sur les personnes et sur les organisations. Les entretiens ont été transcrits, codifiés et analysés selon une stratégie d'analyse thématique de contenu (Paillé et Muchielli, 2021). Résultats/discussion: Les éducatrices sont confrontées à plusieurs exigences du travail (ex. : pression temporelle, groupes surpeuplés et hétérogènes, hausse d'élèves à besoins particuliers) et manquent de ressources pour y faire face (ex. : manque de formation pour intervenir auprès des élèves à besoins particuliers, faible soutien de la part des directions et du personnel enseignant, manque de communication à propos des élèves à risque, absence de participation aux rencontres de suivi des élèves, banalisation des situations par la direction et les collègues). Se sentant considérées au bas de l'échelle professionnelle du milieu scolaire, exclues de "l'équipe-école" et laissées à elles-mêmes, les éducatrices taisent la violence dont elles sont victimes, que ce soit par honte d'être jugées incompétentes ou par conviction que rien ne sera fait pour résoudre le problème. L'absence de reconnaissance au travail contribue à banaliser et rendre invisibles les situations de violence vécues.
References: