AIPTLF 2025 - du 8 au 11 juillet 2025
Qualité de Vie :
Du Travail aux Autres Sphères de l'Existence
Session : Interférences Travail-Famille
Equipes autonomes : quand le travail collectif déborde sur la vie hors travail, quelle prévention ?
VAN DE WEERDT C. 1
1 INRS, Vandœuvre-Lès-Nancy, France
CADRE THEORIQUE
Le monde du travail actuel manifeste un intérêt fort pour les formes d’organisation participatives favorisant l’autonomie et l’implication des salariés (Ughetto, 2018). Dans l’aide à domicile, l’engouement pour ces formes est très marqué. Les difficultés de ce secteur sont surtout liées à la pénurie de personnel et aux taux de turn-over et d’absentéisme élevés (Devetter et al., 2024). Ces formes paraissent constituer une solution pour y faire face (Flamard & Marchand, 2023). Des mesures de prévention existent et sont appliquées mais elles concernent avant tout des structures organisées traditionnellement. Le mode d’organisation en équipes autonomes est encore mal connu et la prévention dans ce champ en est à ses balbutiements. L’étude a cherché à savoir si ce système d’équipes autogérées facilite l’activité et accroit l’épanouissement au travail, ou au contraire, accentue les risques psychosociaux, afin d’identifier les enjeux et leviers de prévention.
METHODOLOGIE
Deux recherches longitudinales de trois ans ont été menées dans deux entreprises d’aide à domicile ayant appliqué le principe d’équipes autonomes « Buurtzorg » qui signifie « soins de proximité ». Fondé par Jos De Block aux Pays-Bas en 2006, ce principe fait intervenir des équipes de 6 à 12 personnes sur des zones restreintes pour réaliser des soins, en s’organisant de façon autonome sur les plannings, le budget, etc. Largement développé aux Pays-Bas, ce mode a inspiré 25 pays en Europe. L’étude, basée sur une recherche dans une entreprise et une recherche-intervention dans l’autre, repose sur des analyses qualitatives du travail et de l’organisation en transformation, effectuées à partir d’entretiens, d’observations de l’activité à domicile et de réunions d’équipe, de séances d’auto-confrontation collective et de débriefing de ces séances.
RESULTATS PRINCIPAUX
L’étude a conduit à analyser les situations de travail réel auxquels les salariés étaient confrontés. Le nouveau mode d’organisation a favorisé l’activité, grâce notamment à des prises de décision plus directes, et une gestion individuelle et collective des risques mieux maîtrisées. Puis sont apparus progressivement des craintes et du stress, dus à une surcharge de travail pour acquérir les nouvelles compétences et assurer les nouveaux rôles, à une sur-responsabilisation, à une surcharge de travail collaboratif, empiétant sur la vie personnelle. Des frustrations sont nées avec l’insatisfaction des attentes de reconnaissance en lien avec l’accroissement des efforts fournis. Si l’autonomisation motive les salariés, elle nécessite du temps et de l’investissement, une reconnaissance accrue, une confiance intra-équipe et des responsabilités partagées.
DISCUSSION
L’étude a permis de dégager les apports du principe « Buurtzorg » et les risques professionnels associés. L’analyse des facteurs de risques psychosociaux préexistants, émergents et futurs probables, a conduit à mettre en place des mesures de prévention co-construites avec les acteurs de terrain. Les actions préventives appliquées ont apporté notamment une meilleure répartition de la charge, une réduction du contrôle entre pairs, une diminution des tensions intra-équipes et une préservation de la vie privée avec des amplitudes horaires respectées. Le mode d’équipes autonomes semble durable si les structures compensent le coût d’entrée de la transformation par des avancées organisationnelles, avec l’application d’une prévention des risques psychosociaux.
References: