AIPTLF 2025 - du 8 au 11 juillet 2025
Qualité de Vie :
Du Travail aux Autres Sphères de l'Existence
Session :
L’IAG au travail : la difficile instrumentation liée à l’opacité du système
HÉRON R. 1, FRÉJUS M. 1
1 EDF R&D, Palaiseau, France
Problématique / Contexte
Le développement de systèmes à base d’IA a permis le transfert de tâches associées à la pensée humaine vers la machine. Avec l’IA générative (IAG), un nouvel élan a emporté l’opinion publique et comme le titrait la Une du Time du 27 février 2023, une « course à l’armement » a lieu pour les grandes entreprises. Dans ce contexte, de nombreux rapports font état des gains en termes de productivité, parfois de qualité lorsque les salariés utilisent des systèmes d’IAG. Les travaux en situations sont encore rares et les résultats rapportés sont centrés sur des indicateurs quantitatifs (e.g., Brynjolfsson et al., 2023) offrant tout de même un éclairage de l’IAG au travail. D’autres travaux se centrent quant à eux sur le nouveau mode d’interaction qu’est le prompting, soulignant ainsi la transformation de l’activité de production et la nécessité de développer de nouvelles compétences (e.g., Suh et al., 2021, Verma & Singh, 2022). Afin de combler l’écart entre une vision centrée sur la productivité et une compréhension de l’interaction avec l’IAG hors contexte professionnel, nous cherchons à comprendre comment l’intégration d’un outil à base d’IAG dans une organisation sociotechnique en place transforme l’activité des salariés. Il s’agit d’une étape nécessaire pour l’utilisation pérenne de ces nouveaux outils par l’entreprise et ses salariés.
?Méthodologie
Les promesses d’amélioration faites lors de l’intégration de nouveaux dispositifs ne sont pas toujours tenues du fait d’une mauvaise ou non prise en compte du travail quotidien. De nombreux auteurs appellent à une conception des systèmes à base d’IA centrée sur l’Humain (e.g., Inkpen et al., 2019 ; Yang et al, 2020) pour pouvoir combiner les intelligences humaine et artificielle (Dellerman et al, 2019).
Avec une démarche qualitative inscrite dans l’analyse de l’activité (Leplat, 2004), cette étude s’appuie sur le déploiement test de Copilot 365 dans une grande entreprise française. Neuf participants ont été recrutés au sein d’un panel de plus de 300 « expérimentateurs » auxquels une licence Copilot 365 avait été attribuée. Nous avons réalisé des entretiens de remise en situation à partir de traces de l’activité (Theureau, 2010). Les traces utilisées en entretiens étaient recueillies par les participants, dans un carnet de bord durant 1 à 2 mois.
Résultats/Discussion
Nos résultats montrent des difficultés liées à des failles d’explicabilité remettant ainsi en cause l’hypothèse de facilité d’utilisation en langage naturel. Le mode d’interaction conduit à une focalisation sur le résultat au lieu du processus, associée à une évaluation du travail de l’outil uniquement sur la base de ses sorties. Les salariés ont des difficultés à attribuer les raisons d’une réponse non satisfaisante. En s’adaptant à ces nouvelles modalités d’interaction, ils prennent en charge un lot de nouvelles tâches (e.g., préparation des données, découpage du « prompt » en parties, vérification des sources). Ces résultats soulèvent des questions concernant (1) les modes d’interactions avec l’IAG qui pour l’instant sont « simples » seulement du point de vue des concepteurs, ainsi que (2) la préparation des systèmes d’informations en parallèle du déploiement de ce type d’outils afin que ces derniers puissent fonctionner sans actions supplémentaires pour les utilisateurs. Cela invite à repenser l’interaction avec ces systèmes en dépassant l'approche par prompt, ainsi que l’accompagnement des salariés.
References: