La pratique du télétravail ou travail à distance s’est développé grâce au développement des technologies de l’information, mais c'est la pandémie de COVID-19 qui l’a rendu incontournable dans de nombreux secteurs (Antunes et al., 2023). Face à cette évolution, plusieurs d’études ont examiné les effets du télétravail, abordant des dimensions telles que la productivité, la satisfaction des employés et l’équilibre entre les vies professionnelle et personnelle (Athanasiadou & Theriou, 2021). Ces recherches mettent en lumière des résultats parfois contrastés, soulignant à la fois les avantages et les défis associés au télétravail, notamment celui de la santé mentale (Charalampous et al., 2019). Notre étude s’inscrit dans ce champ en explorant l'impact du télétravail sur l’engagement et la santé psychologique (p.ex., Sardeshmukh et al., 2012), en s’appuyant sur la théorie des demandes et des ressources (p.ex. Auton & Sturman, 2024). En effet, le télétravail présente plusieurs avantages (ressources), notamment un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, une autonomie accrue et une auto-efficacité renforcée (p.ex., Vayre et al., 2022). Cependant, des défis (demandes) tels que l’augmentation de la charge de travail, l’hyperconnectivité, ou encore un soutien organisationnel insuffisant peuvent freiner ses bénéfices (p.ex., Vayre et al., 2022). Ces facteurs illustrent l’importance d’adopter une perspective équilibrée pour comprendre les impacts variés du télétravail (Merkouche et Ndeyong Youmbi, 2024). Nous nous intéressons particulièrement à ce phénomène qui exacerbe les enjeux de gestion des ressources humaines dans le contexte de pénurie de main d’œuvre qualifiée au Québec et au Canada. En ce sens, la majorité des télétravailleurs au Québec ont des études universitaires, touchent un salaire de 50 $ et plus, occupent des emplois non manuels et travaillent dans le secteur des services (ISQ, 2022).   
Ainsi, une collecte de données a été menée en 2023-2024 auprès de 132 travailleurs dans un centre de recherche en santé au Québec. Dans le cadre de cette recherche quantitative exploratoire en cours, nous effectuons des analyses multivariées afin d'examiner la contribution de certaines conditions entourant la réalisation du travail à distance sur l'engagement affectif et la santé psychologique au travail. Nos analyses préliminaires suggèrent que la possibilité de faire ou ne pas faire du télétravail a un effet positif statistiquement significatif sur l’engagement affectif (B= 0,31, p= 0,04), que le choix ou non de faire du télétravail est associé à une augmentation significative de l'engagement affectif (B = 0,88, p< 0,001) et que la fréquence (nombre de journées par semaine) du télétravail contribue à une réduction de la détresse psychologique (B= −0,13, p= 0,03).
Certains résultats sont en cohérence avec la documentation existante alors que d'autres soulèvent des questionnements méritant d'être approfondis dans le cadre de recherches futures. Ces résultats apportent certainement des réflexions intéressantes concernant le rôle du télétravail comme nouveau mode d’organisation de travail appelé à marquer l’avenir du travail. Le télétravail bien instauré et bien dosé (Gohoungodji et al., 2023) devient inévitablement un levier stratégique à la promotion de la santé psychologique au travail et à l’amélioration de l’engagement affectif qui est lui-même un facteur important de rétention de personnel (Rubenstein et al., 2018).
 

References:

• Antunes, E D., Bridi, L. R. T., Santos, M., & Fischer, F. M. (2023). Part-time or full-time teleworking? a systematic review of the psychosocial risk factors of telework from home. Frontiers in Psychology, 14:1065593. doi: 10.3389/fpsyg.2023.1065593
• Athanasiadou, C., & Theriou, G. (2021). Telework: systematic literature review and future research agenda. Heliyon, 7(10). Doi.org/10.1016/j.heliyon.2021.e08165
• Auton, J. C., & Sturman, D. (2024). Teleworking during the COVID-19 pandemic: the job demands and job resources associated with telework outcomes. Australian Psychologist, 59(4), 341-353.
• Charalampous, M., Grant, C. A., Tramontano, C., & Michailidis, E. (2019). Systematically reviewing remote e-workers’ well-being at work: A multidimensional approach. European journal of work and organizational psychology, 28(1), 51-73.
• Gohoungodji, P., N’Dri, A. B., & Matos, A. L. B. (2023). What makes telework work? evidence of success factors across two decades of empirical research: a systematic and critical review. International Journal of Human Resource Management, 34(3), 605–649. https://doi.org/10.1080/09585192.2022.2112259
• Institut de la statistique du Québec (2024). Portrait du télétravail au Québec : plus du tiers des personnes en emploi télétravaillent, mais cette proportion varie selon les régions. https://statistique.quebec.ca/fr/communique/portrait-teletravail-quebec
• Merkouche, W. et Ndeyong Youmbi, B. R. (2024). Réflexion et pistes de recherches sur les liens entre le télétravail et la santé mentale des employés : un avantage ou un risque ? Dans Y. Mohamed et O. Choinière (dir.), Au-delà de la pandémie : vers un avenir du travail pluriel (p. 123-156). Les Éditions JFD inc.
• Rubenstein, A. L., Eberly, M. B., Lee, T. W. & Mitchell, T. R. (2018). Surveying the forest: A meta?analysis, moderator investigation, and future?oriented discussion of the antecedents of voluntary employee turnover. Personnel Psychology, 71(1), 23-65.
• Sardeshmukh, S. R., Sharma, D., & Golden, T. D. (2012). Impact of telework on exhaustion and job engagement: A job demands and job resources model. New Technology, Work and Employment, 27(3), 193-207.
• Vayre, É., Morin-Messabel, C., Cros, F., Maillot, A.-S. & Odin, N. (2022). Benefits and Risks of Teleworking from Home: The Teleworkers’ Point of View. Information 2022, 13(545), 1-19. https://doi.org/10.3390/info13110545