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AIPTLF 2025 - du 8 au 11 juillet 2025

Qualité de Vie :
Du Travail aux Autres Sphères de l'Existence

Session : Fonction publique et santé psychologique

Étude des violences au travail chez les femmes travaillant en milieu pénitentiaire

EL BARDOUNI A. 1, KHAOUDI A. 1, OUCHELH M. 2, BELHAJ A. 3

1 Université Moulay Ismail, Meknès, Morocco; 2 Université Mohammed V, Rabat, Morocco; 3 École Supérieure de Psychologie, Casablanca, Morocco

La question de la violence en milieu carcéral constitue une problématique majeure, en particulier pour les agentes pénitentiaires, dont les conditions de travail sont marquées par une exposition récurrente à des formes diverses d'agressions physiques et psychologiques (DGAPR, 2019). L'environnement pénitentiaire se caractérise par un climat de tension permanente, où l'interaction avec une population carcérale est susceptible de générer des comportements violents à l'encontre des professionnelles (Therriault et al., 2014). La nature des fonctions exercées par ces agentes, impliquant le maintien de l'ordre et de la discipline au sein des établissements pénitentiaires, les expose à des risques psychosociaux notables, parmi lesquels le stress chronique et le syndrome d'épuisement professionnel (Boudoukha et al., 2011). Dans ce contexte, cette étude exploratoire préliminaire vise à dégager les principales manifestations de violence au travail auxquelles sont confrontées les agentes pénitentiaires, en adoptant une démarche qualitative. L'enquête repose sur une série d'entrevues semi-structurés menés auprès d'un échantillon de neuf surveillantes de prison (N=9) exerçant dans trois établissements carcéraux de la région de Rabat-Salé-Kénitra. L'analyse thématique des données recueillies met en exergue deux formes de violence dominantes : la violence psychologique, qui se manifeste notamment par des humiliations et des insultes proférées par les détenu(e)s, et la violence physique, incluant des agressions directes telles que des bousculades et des griffures. Ces résultats corroborent les conclusions de travaux antérieurs consacrés à la précarité des conditions de travail en milieu pénitentiaire. Konda et al. (2012) soulignent que les agentes pénitentiaires, en raison de leur statut professionnel et de leur position d'autorité, sont particulièrement vulnérables aux agressions. De même, Garland et al. (2014) ont mis en évidence le lien entre l'insécurité perçue et l'augmentation du niveau de stress et de burnout. Par ailleurs, les travaux de Boudoukha et al. (2011) démontrent que l'intensité et la récurrence des agressions subies influencent directement le degré d'épuisement émotionnel des surveillantes de prison. L'adoption d'une approche exploratoire dans cette étude se justifie par l'insuffisance des travaux portant spécifiquement sur les agentes pénitentiaires marocaines. Toutefois, la petite taille d'échantillon constitue une limite importante quant à la généralisation des résultats. A cet effet, une étude quantitative confirmatoire est effectuée afin d’investiguer les effets des exigences (i.e., violences) et des ressources au travail sur la santé psychologique des fonctionnaires pénitentiaires, en considérant un échantillon plus grand et une approche méthodologique permettant de tester des hypothèses fondées sur les constats issus de cette première phase qualitative. Cette étude met en lumière la précarité des conditions de travail des surveillantes de prison et la nécessité d'une réflexion approfondie sur les mécanismes de prévention des agressions physiques et psychologiques. En termes de perspectives, les futures recherches devraient s'attacher à mieux comprendre les facteurs de protection et de risques de la santé au travail de ces travailleuses, ainsi qu'à déterminer les mesures organisationnelles les plus efficaces pour réduire  les risques psychosociaux, notamment les risques d’agression auxquels elles sont exposées.

References:

  • Belhaj, A. (2016). Les risques psychosociaux au travail, Etat des lieux et perspectives d’intervention de la Psychologie. Communication présentée au colloque Travail, Santé et Sécurité : approches des dimensions humaines et sociales, FLSH/UM5 (Rabat). Boudoukha, A. Hautekeete, M., Abdelaoui, S., Groux, W., & Garay, D. (2011). Burnout et victimisations : effets des agressions des personnes détenues envers les personnels de surveillance. Revue de l’Encéphale, 37, 284-292. Courcy, F., Savoie, A. (2003). Clarifier le concept d’agression en milieu de travail : Préciser des sources, ses formes et sa prévalence. In : R. Foucher, A. Savoie et L. Brunet (dir.), Concilier performance organisationnelle et santé psychologique au travail (pp 233- 240). Montréal : Editions nouvelles. Délégation générale à l’administration pénitentiaire et la réinsertion (2019), Rapport d’activité? de 2019. En ligne : https://www.dgapr.gov.ma/publication/pdf/rapp2019_ar.pdf Therriault, P.-Y. Saint-Jean, M. Ruelland, I. Réhaume, J. Alderson, M. & Lavoie M. (2014). Le collectif de travail : une protection pour la santé psychologique d’éducateurs d’ateliers industriels en milieu carcéral. Revue de psychologie du travail et des organisations. 20,43-62.