« En démontant puis en remontant l’objet technique qui se trouve devant vous, identifiez quels sont les éléments qui composent cet objet, comparez ces éléments entre eux et expliquez sa loi de fonctionnement, autrement dit comment ça marche. ». Telles ton les consignes données aux participants impliqués dans une séquence provoquée par la Méthode de l’objet technique (MOT) (Gaubert et al., 2024). Drôle de situation dans laquelle les participants (travailleurs expérimentés mais aussi, selon les situations, managers, directions, représentants du personnel, etc.) vont devoir simuler leur activité (Bobillier et al., 2018 ; Van Belleghem, 2018) qui se trouvera directement convoquée par l’usage d’un objet technique (qui peut être un outil, une procédure, etc.) choisi au préalable pour susciter un débat sur le travail. Cette méthode est donc une proposition pour engager un travail collectif d’élaboration de l’expérience professionnelle propice au développement des sujets et des organisations. Elle invite à l’expression individuelle et collective de ce que l’on sait, ce que l’on ne sait pas, de ce que l’on voudrait savoir sur le fonctionnement d’un objet technique issu de la situation de travail, mais aussi à l’expression de nouvelles possibilités. Plus largement, la MOT facilite l’engagement dans un exercice d’explicitation de l’activité, de questionnement et réactive des dialogues professionnels qui ont dû mal à se construire entre ceux qui font le travail et ceux qui le conçoivent. Les professionnels de terrain sont alors reconnus comme producteurs de solutions et non comme récepteurs de « bonnes pratiques » à suivre. Dans cette approche, l’analyse par les collectifs de travail de leurs modes de relations individuelles et collectives aux objets techniques va permettre de questionner les différentes dimensions du métier (Clot, 2008) et de son développement. Dans cette perspective et ce cadre méthodologique, l’objet technique devient « l’analyseur » du métier et le « médiateur » des controverses sur les règles de métier.
La communication présentera les principes de cette méthode (peu connue) et ses visées. De plus, à partir d’un exemple, elle proposera de discuter en quoi elle peut constituer une ressource pour agir en santé au travail dans une perspective clinique du travail. L’intervention se définissant comme un processus de transformation (Rouat, 2021), intervenir en santé au travail signifie alors chercher à engager des transformations à différents niveaux possibles : individuel, collectif et organisationnel pour construire des ressources favorables au développement de l’activité et de la santé. Pour la clinique du travail, la construction de ces ressources doit mettre à contribution les acteurs dans une activité dialogique, réflexive et créatrice. L’expérience qu’on a et qu’on fait du travail, mais aussi et surtout l’analyse collective que les acteurs parviennent à construire sur cette expérience, peuvent devenir des voies prometteuses pour repenser les manières de faire et d’organiser le travail. La MOT s’attache à déployer cette clinique de l’expérience collective médiatisée par les objets techniques.

References:

• Gaubert, T., Cuvillier, B., Leblanc, E., & Rouat, S. (2024). La méthode de l'objet technique. Reprendre la main sur l'activité. Octarès.
• Rouat, S. (2021). L’intervention en santé au travail: pour une clinique de l’intervention et de l’expérience collective. Conservatoire National des Arts et Métiers.
• Bobillier Chaumon, M.-É., Rouat, S., Laneyrie, E., & Cuvillier, B. (2018). De l’activité DE simulation à l’activité EN simulation : simuler pour stimuler. Activités, 15(1). DOI : 10.4000/activites.3136
• Van Belleghem, L. (2018). La simulation de l’activité en conception ergonomique : acquis et perspective. @ctivités, 15 (1). DOI : 10.4000/activites.3129