La communication vise à discuter les forces et limites de la notion d’adaptabilité de carrière dans les transitions professionnelles. Bien que largement validée empiriquement, cette notion repose sur des dimensions psychosociales (préoccupation, contrôle, curiosité, confiance : les « 4C ») qui peuvent être influencées par des facteurs contextuels et culturels. L’adaptabilité ne se limite pas à des traits individuels stables, mais implique également des interactions dynamiques avec l’environnement professionnel. Définie par Savickas (1997) sur la base des travaux de Super, la notion repose sur la capacité des individus à faire face aux défis prévisibles et imprévus liés aux trajectoires professionnelles. Les 4 C sont conceptualisés comme des ressources psychosociales, distinctes des traits de personnalité qui jouent un rôle clé dans les transitions professionnelles.

Trois analyses critiques sont présentées : 1- la limite des approches différentielles : la recherche s'est principalement orientée vers une évaluation des caractéristiques individuelles, en utilisant des outils comme le Career Adapt-Abilities Scale (CAAS) (Savickas & Porfeli, 2012). Cependant, cette approche décontextualisée réduit la richesse de la notion en négligeant les dimensions sociales et environnementales. 2- les limites narratives : alors que l’approche socioconstructiviste du Life Design à l’origine du concept d’adaptabilité de carrière intègre une perspective narrative et contextuelle, son application reste limitée dans la recherche empirique. 3- la limite pratique : malgré son potentiel, l'adaptabilité est focalisée sur l'individu en minimisant l'impact des structures organisationnelles et économiques. Cette perspective peut accentuer la pression sur les individus pour s'autoréguler sans offrir de soutien institutionnel adéquat.

D’un point de vue plus global, ces approches individualisées peuvent omettre de considérer les inégalités d’accès aux ressources qui influencent la capacité des individus à mobiliser ces compétences adaptatives. Trois pistes développementales seront évoquées : 1- une approche contextualisée : le modèle pourrait être enrichi par des perspectives intégrant les interactions entre l'individu et son environnement, comme le propose l'Inventaire Informatisé du Système des Activités (IISA) (Pouyaud, 2014). 2- la prise en compte des ressources narratives : la combinaison des mesures standardisées et des récits de vie offre une vision plus holistique des processus d’adaptation (Pouyaud et Bercherie, 2013). 3- la validation conceptuelle : au même titre l’employabilité ou la résilience, une redéfinition conceptuelle semble nécessaire pour permettre de penser l’adaptabilité comme un ensemble de ressources dépendant autant du contexte que de la personne.

References:

• Savickas, M. L. (1997). Career adaptability: An integrative construct for life-span, life-space theory. The Career Development Quarterly, 45(3), 247-259.
• Savickas, M. L., & Porfeli, E. J. (2012). Career Adapt-Abilities Scale: Construction, reliability, and measurement equivalence across 13 countries. Journal of Vocational Behavior, 80(3), 661-673.
• Rudolph, C. W., Lavigne, K. N., Katz, I. M., & Zacher, H. (2017). Career adaptability: A meta-analysis of relationships with measures of adaptability, person–environment fit, and work outcomes. Journal of Vocational Behavior, 98, 173-187.
• Pouyaud, J., & Bercherie, E. (2013). From Core Self-concept to Protean Career: The role of career adapt-abilities resources. Communication au symposium Life Designing and Career Counseling: Building Hope and Resilience, Padoue, Italie.