Dans le cadre de formation professionnelle, les formateurs peuvent avoir recours à des dispositifs de formation par simulation, qui reproduisent à des degrés de fidélité variables une situation naturelle de travail (Murphy & Halamek, 2005). Cependant, bien qu’expérimentés dans leur domaine, ces formateurs sont souvent peu, voire pas du tout formés à l’andragogie (Alonso Vilches et al., 2021), ce qui peut compliquer leur insertion dans le domaine de la formation (Deschenaux & Roussel, 2010). Pour surmonter les difficultés rencontrées, les formateurs semblent chercher à garder un certain contrôle de la simulation (Dubois & Van Daele, 2018).
Une étude menée dans le cadre d’une formation par simulation pour des candidats pompiers-sergents belges tend à confirmer ce constat. Celle-ci a porté sur l'activité du formateur, tant lors des séances de simulation que des débriefings de 21 scénarios simulant des incendies dans divers contextes (maison, hôpital, maison de repos et de soins, etc.) où le formateur intervenait à la fois comme formateur et comme acteur. Ces séances de simulation étaient suivies d’un débriefing à chaud, où les candidats énonçaient les difficultés rencontrées, et d’un débriefing à froid, au cours duquel ils commentaient les traces enregistrées de leur activité. Au total, 41 candidats et un formateur-lieutenant ont participé à cette étude.
L'analyse de l'activité du formateur lors des séances de simulation a consisté à transcrire et classer ses interventions selon qu'elles relèvent de son rôle de formateur ou d'acteur. Ses interventions ont ensuite été codées selon les sept modalités de guidage de Policard (2018), avec un relevé des effectifs pour chacune de ces modalités. Concernant les débriefings, l’analyse a porté sur le nombre d'arrêts sur image initiés par le formateur et par les candidats, ainsi que sur les interventions du formateur, codées à l'aide d'une grille élaborée à partir des travaux de Derobertmasure (2012) sur les fonctions des interventions des formateurs et d'Altet (1993) sur les styles didactiques. L’analyse des interventions des candidats lors des débriefings à chaud a permis d’identifier les difficultés rencontrées, lesquelles ont été classées selon différents aspects de l’activité de sergent (sécurité, communication, prise de décision, etc.). Ces difficultés ont ensuite été comparées à celles abordées par le formateur lors des débriefings à froid, afin de déterminer dans quelle mesure les difficultés énoncées lors du débriefing à chaud sont prises en compte par le formateur lors du débriefing à froid.
Les résultats montrent que les séances de simulation sont marquées par une approche directive du formateur, qui semble vouloir contrôler le déroulement de la séance et provoquer intentionnellement des erreurs chez les candidats en introduisant des perturbations dans le scénario. Ces perturbations plongent les candidats dans une situation dégradée, où l’erreur devient inévitable. Le formateur endosse alors le rôle d’officier, chargé de reprendre le contrôle de la situation, et donne des directives que les candidats suivent sous son autorité. Les débriefings, pour leur part, demeurent largement dominés par le formateur, qui se focalise principalement sur le rappel des procédures, limitant ainsi la participation des apprenants et négligeant les difficultés énoncées lors des débriefings à chaud. Une telle approche entrave leur apprentissage, notamment le développement de compétences réflexives et d’adaptation.