AIPTLF 2025 - du 8 au 11 juillet 2025
Qualité de Vie :
Du Travail aux Autres Sphères de l'Existence
Session : Santé au Travail et Crise sanitaire
La désorganisation des activités de nettoyage à l’épreuve de la santé
PRUNIER-POULMAIRE S. 1, DEVETTER F. 2, GALEY L. 1
1 Université Paris Nanterre, Nanterre, France; 2 Université de Lille, Lille, France
En 2021, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a initié une auto-saisine en réponse à des préoccupations croissantes concernant les risques sanitaires pour les agents du secteur du nettoyage et de la propreté en France. Pour répondre à ces inquiétudes, un groupe de travail (GT) pluridisciplinaire intitulé "Analyse des conditions de travail des agents du nettoyage et de leurs impacts sur leur santé" a été constitué. Cette communication scientifique a été construite dans le contexte de cette expertise ANSES.
Le travail des agents d’entretien est principalement réalisé par des femmes (80 %, DARES, 2019) aux conditions de travail dégradées. La connaissance de ces situations de travail pénibles est identifiée depuis les années 90 grâce à des travaux précurseurs en ergonomie (Messing et al., 1993; Calvet et al., 2012; Lefrançois, Messing, et al., 2017; Lefrançois, Saint-Charles, et al., 2017). En France, les salariées concernées par une activité de nettoyage sont proches de 2 millions (DARES, 2019). Il apparait pourtant que le travail des agents d’entretiens reste parmi les plus pénibles et précaires d’après les dernières études françaises sur les conditions de travail (DARES, 2019 et enquêtes SUMER). La pénibilité physique de ce travail commence à être documenté comme les expositions aux produits chimiques et leurs effets (Bitzas et al., 2022; W. Lee et al., 2022; Lin et al., 2022; S. Lee et al., 2024). Toutefois, les conséquences des horaires de travail sur le travail lui-même et sur la santé restent à préciser afin de comprendre les mécanismes d’atteinte à la santé.
Cette communication propose une approche originale quantitative associant ergonomie et économie afin de rendre visible ces conditions de travail pour proposer des leviers de transformation. La méthode déployée est basée sur une analyse des temps de travail quotidiens des salariés du nettoyage en France (Devetter & Valentin, 2024). Le « taux de normalité » par rapport à une journée de travail dans les horaires « normaux » entre 8h et 17h est décrit, ainsi que le « taux de densité » (Devetter & Valentin, 2024) calculé à partir de la durée moyenne de plusieurs journées de travail par rapport à la durée de la journée normale. Les données renseignées dans l’enquête conditions de travail de la DARES (2019) sont utilisées. L’enquête emploi de 2019 et la littérature scientifique permettent de décrire en complément des effets sur la santé liés à ces conditions temporelles de travail.
Il apparait que ce travail de nettoyage est principalement fragmenté, réalisé dans des horaires atypiques, par des femmes, dans des cellules parfois monoparentales, avec des relations d’emploi externalisées et avec plusieurs employeurs, entravant l’accès au droit sociaux et à un salaire décent et générant des tensions dans la vie au travail et hors travail. In fine, les conditions et le contenu de ce travail entretien une précarité des travailleuses du nettoyage. L’organisation du travail est au cœur des atteintes à la santé observées. Une transformation profonde des droits du travail apparait nécessaire. Les dernières préoccupations en lien avec la RSE des entreprises ouvrent des perspectives d’évolution.
References: