AIPTLF 2025 - du 8 au 11 juillet 2025
Qualité de Vie :
Du Travail aux Autres Sphères de l'Existence
Session : Maintien et Retour au Travail
Délibérer des pratiques pro-inclusion : une étude de l’activité de référents aux prismes de la psychologie du travail et de la théorie de la régulation sociale
RIVAULT M. 1
1 IPAG Business School / Université de Montpellier, Paris, France
Les politiques de lutte contre les discriminations et de promotion de l’inclusion sont à la fois le produit et la source d’innovations légales et normatives (Radé, 2011, Miné, 2021), organisationnelles (Bruna, 2013b, Bruna et Chanlat, 2015), sociales et de services. Malgré leur théorisation et leur diffusion en France dès les années 2003 et 2004 (Djabi-Saïdani, Pérugien, 2020), de nombreux travaux soulignent la persistance d’inégalités dans divers domaines.
Leur développement, récemment contesté au niveau international, s’inscrit dans l’activité de réseaux inter-organisationnels implantés dans différents champs : économique (MEDEF, Institut Montaigne), publiques (Agefiph, Fiphfp), académique (CPED, CGE) et associations spécialisées (ORSE, AFMD). Ces réseaux constituent des espaces d’échange où des professionnels issus d’organisations parfois concurrentes contribuent à l’élaboration de normes et de règles de métier.
Nous étudierons comment ces échanges contribuent à l’élaboration d’un genre professionnel pro-inclusion, façonné par le dialogue entre pairs. Pour cela, nous mobiliserons la théorie de la régulation sociale (Reynaud, 1997), la clinique de l’activité (Clot, 2017) et la psychodynamique du travail (Dejours, 2016, 2020). La première éclaire la dynamique d’élaboration des règles à travers des négociations entre acteurs aux intérêts divers jouant sur et avec les règles du jeu. La seconde met en évidence le rôle de la délibération dans l’évolution des pratiques et du pouvoir d’agir. La dernière insiste sur l’engagement subjectif dans le travail et la nécessité de règles sociales, langagières, techniques et éthiques pour structurer l’activité collective (Molinier, 2008). Ces approches théoriques convergent en ce qui concerne la nécessité d’étudier l’activité des acteurs in situ tandis que la psychologie du travail invite à approfondir l’étude jusque dans les empêchements d’agir. Elle invite à déplier l’activité dans son épaisseur pour mettre en partage les joies comme les échecs, les tricheries ordinaires comme le réel de l’activité.
Notre analyse repose sur un corpus constitué par recours aux méthodologies d’observation participante et de participation observante, ainsi que sur des documents issus des réseaux de référents handicap et égalité femmes-hommes de la Conférence des Grandes Écoles (guides, fiches pratiques, baromètres, travaux en cours, comptes rendus et transcriptions de réunions). Nous avons analysé neuf réunions du groupe de travail Egalité et dix du groupe de travail Handicap et trois sessions dédiées aux cellules d’écoute, de décembre 2022 à novembre 2024.
Nos résultats montrent que la délibération entre pairs au sein d’un réseau inter-organisationnel permet de rompre l’isolement des référents, de partager des pratiques et des problématiques récurrentes ou préoccupantes et d’élaborer des référentiels d’action communs. Cependant, certaines limites émergent : le recours croissant aux réunions hybrides réduit les rencontres, entrave les discussions interstitielles et la construction de relations de confiances. En tant qu’instances externes aux organisations dans lesquels les référents travaillent, les réseaux dévoilent des problématiques récurrentes (diversité des statuts et ressources des référents, complexité des enjeux traités, forte variabilité des situations) mais peinent à impulser la reconfiguration organisationnelle nécessaire à la traduction concrète des politiques d’inclusion.
References: