AIPTLF 2025 - du 8 au 11 juillet 2025
Qualité de Vie :
Du Travail aux Autres Sphères de l'Existence
Session : Santé, communication et adaptation au travail
Télétravail et conciliation des vies privée et professionnelle : une analyse des disparités par le genre
DUPONT C. 1, FERAUGE P. 1, GIULIANO R. 1, GODFROID C. 1
1 Université de Mons (UMONS, Belgique), 7000 MONS, Belgium
Notre étude explore si le télétravail facilite la conciliation des vies privée et professionnelle sous l’angle du genre. Le télétravail est souvent présenté comme une des solutions majeures pour concilier au mieux vie privée et vie professionnelle, notamment via une réduction des temps de trajet (Baruch, 2001), une plus grande flexibilité et une liberté dans la manière d’organiser ses journées (Nätti et al., 2011). Il pourrait ainsi principalement profiter aux femmes (Aguilera et al., 2016 ; Galvez et al., 2020) qui sont plus enclines que les hommes à devoir assumer à la fois des tâches professionnelles et domestiques. Il pourrait même promouvoir une meilleure égalité homme-femme (Gutek, 1983). Cependant, certains auteurs estiment que le télétravail pourrait accentuer le conflit entre les sphères privée et professionnelle et non l’atténuer (Tremblay et al., 2006) en rendant plus poreuse la frontière entre ces deux sphères. Il ne serait dès lors pas aussi avantageux pour les femmes. Il s’agit là d’un des paradoxes du télétravail (Gajendran et Harrison, 2007) rendant peu clair son impact sur la conciliation des vies privée et professionnelle (Tremblay et al., 2006 ; Eurofound, 2022).
Nous avons mené, en 2023, une enquête au moyen d’un questionnaire en ligne qui se composait principalement de questions à choix multiples et de questions basées sur des échelles d’accord et d’importance (échelles de Likert). Elles portaient notamment sur la fréquence et la perception du télétravail et sur son impact sur la conciliation des vies privée et professionnelle (durée de travail en télétravail/dans l’entreprise, activités domestiques/familiales réalisées durant le télétravail, organisation de la journée de télétravail, comparaison de la répartition des tâches domestiques et familiales entre les situations de télétravail et de travail sur site, …). L’enquête s’adressait à toute personne télétravaillant au moins une fois par semaine à son domicile. Au total, 274 télétravailleurs (181 femmes et 93 hommes) ont répondu à notre enquête. Les données, qui ont été traitées à l’aide des logiciels de statistiques SPSS et STATA, ont fait l’objet d’une régression logistique ordinale. Des tests Chi2 ont aussi été réalisés sur certaines variables nominales de notre modèle.
Nos résultats montrent que la fréquence du télétravail a un effet positif et significatif sur la satisfaction perçue à concilier les vies privée et professionnelle. Ainsi, les travailleurs télétravaillant au moins 3 jours par semaine semblent plus enclins à éprouver de la satisfaction par rapport à cette conciliation. Le télétravail semble aussi procurer un niveau de flexibilité plus important que la flexibilité permise par le travail au bureau. Nous constatons aussi un effet modérateur du genre sur la relation entre fréquence du télétravail et satisfaction par rapport à la conciliation des vies privée et professionnelle. Ainsi, le fait d’être télétravailleuse plutôt que télétravailleur viendrait atténuer cette relation positive.
Notre étude montre aussi que le pourcentage de télétravailleuses s’estimant plutôt ou très satisfaites quant à l’effet du télétravail sur la répartition des tâches domestiques et familiales avec leur partenaire est bien plus faible que le pourcentage de télétravailleurs. Les femmes continuent à porter une double charge – professionnelle et domestique – renforcée par les attentes culturelles et les stéréotypes de genre.
References: